Transport de matières dangereuses : comment bénéficier de l’exemption d’ADR tout en restant conforme ?
Les régimes d’exemption offrent une certaine souplesse aux entreprises, mais leur application suppose de bien comprendre les règles de l’ADR et de l’arrêté TMD. Alors, dans quels cas peut-on transporter des matières dangereuses sans appliquer l’ADR ? Quelles sont les conditions, les obligations qui subsistent, les risques encourus et les bonnes pratiques pour rester conforme ?
Qu’est-ce que l’ADR et dans quels cas s’applique-t-il ?
Accord européen pour le transport routier (ADR) : principe et objectifs
L’ADR fixe un cadre pour le transport routier international des marchandises considérées comme « dangereuses » dans l’ensemble des États signataires. De nombreux États l’appliquent également en transport national.
Chaque mode de transport est encadré par son propre règlement (transport routier, ferroviaire, maritime et aérien) et est souvent mis à jour. La version la plus récente est l’édition « ADR 2025 » applicable depuis le 1er janvier 2025.
En France, cette réglementation est rendue applicable par l’Arrêté TMD (Transport de Marchandises Dangereuses) du 29 mai 2009. Une nouvelle version est parue en 2025 afin d’intégrer les changements de l’ADR 2025.
L’ADR instaure des règles strictes en matière de transport, de chargement et déchargement des matières dangereuses pour toute marchandise en partance vers l’Europe.

Les principales obligations de l’ADR
L’ADR classe chaque marchandise dangereuse selon sa classe de risque (de 1 à 9 : explosif, gaz, liquide inflammable, etc.) et son numéro ONU, identifiant unique attribué à chaque produit. Certains comportent aussi un groupe d’emballage (I à III) selon leur niveau de dangerosité. Ces éléments définissent les exigences de transport express :
- Utiliser un emballage homologué portant le marquage « UN » ;
- Apposer les étiquettes de danger correspondantes ;
- Assurer la signalisation du véhicule ;
- Fournir une documentation complète (numéro ONU, classe, désignation officielle) ;
- Garantir la formation du personnel manipulant ou transportant ces produits.
Le transporteur doit également s’assurer du bon état des colis et du respect des consignes de chargement et de déchargement. L’ensemble constitue une chaîne de conformité stricte destinée à protéger les personnes, les biens et l’environnement.
Elle somme, elle intègre aussi bien des règles et obligations sur les emballages, l’étiquetage, la signalisation, les équipements individuels de protection (EPI) que sur la circulation du véhicule
Quand peut-on transporter des matières dangereuses sans appliquer l’ADR ?
Certaines situations permettent de transporter des marchandises dangereuses sans appliquer l’ensemble des exigences de l’ADR. Ces exemptions, prévues à la fois par l’ADR et l’arrêté TMD, concernent surtout les quantités et le contexte du transport.
Quelles sont les exemptions prévues par l’ADR et l’arrêté TMD ?
L’article 1.1.3 de l’ADR détaille plusieurs cas où les prescriptions complètes ne s’appliquent pas. Les plus courantes concernent :
- Les quantités limitées (LQ) : lorsqu’un produit est conditionné en petits volumes définis par la réglementation ;
- Les quantités exceptées, encore plus restreintes ;
- Le transport lié à l’activité principale d’une entreprise (par exemple un artisan transportant ses propres produits chimiques vers un chantier).
Quantités limitées et emballages exceptés
Les régimes LQ et EQ (Excepted Quantities) sont très utilisés dans l’industrie. Un produit classé « liquide inflammable » (classe 3, UN 1993) peut par exemple être transporté sans application complète de l’ADR si chaque emballage contient moins de 5 litres et que la quantité totale reste sous le seuil défini.
Dans ce cas, certaines obligations comme la plaque orange sur le véhicule ou le certificat ADR du conducteur ne sont plus exigées. Cependant, les colis doivent rester correctement emballés, fermés et étiquetés.
Transport secondaire ou interne à l’entreprise
Autre situation d’exemption : le transport secondaire, lié à l’activité principale de l’entreprise. Par exemple, une société de maintenance peut transporter une petite quantité de produits corrosifs pour ses propres besoins. Si le transport reste accessoire, sur des distances limitées et sous contrôle direct de l’entreprise, une exemption est possible.
Ces cas nécessitent toutefois d’évaluer la nature de la matière, la quantité et les conditions de transport. HK Courses conseille régulièrement les entreprises pour calculer ces seuils et documenter correctement leurs opérations.

Les obligations qui demeurent même en cas d’exemption
Bénéficier d’une exemption ne dispense pas de tout. Certaines obligations restent impératives, car elles relèvent du bon sens sécuritaire.
Emballage et marquage
Même sans application complète de l’ADR, l’emballage doit être approprié, solide et dans la plupart des cas, homologué. Il doit indiquer clairement le numéro ONU et la classe du produit. Une fuite ou un colis endommagé rend immédiatement l’exemption caduque et expose à des sanctions.
Formation du personnel
L’arrêté TMD impose une formation adaptée à tous les acteurs : expéditeur, chargeur, conducteur, réceptionnaire. Elle doit couvrir les risques, la manipulation des produits, la lecture des étiquettes et les procédures en cas d’incident.
Même lorsqu’aucun certificat ADR n’est requis, cette formation interne est indispensable.
Sécurité du véhicule et responsabilité
Le véhicule doit garantir une bonne stabilité des charges, une ventilation suffisante et des équipements de première intervention (gants, absorbants, extincteurs selon le type de matière).
L’entreprise reste responsable de la sécurité du transport, même si celui-ci se fait sous exemption. En cas d’incident, les autorités peuvent sanctionner le chargeur ou le transporteur pour défaut de précaution.
Quels sont les risques et les sanctions en cas de non-conformité ?
Ignorer la réglementation ou mal interpréter les exemptions peut coûter cher. Les contrôles de la DREAL ou des forces de l’ordre sont fréquents sur les transports de produits dangereux. Une non-conformité (mauvais étiquetage, absence de documents, emballage inadapté) peut entraîner une amende administrative, l’immobilisation du véhicule, voire des poursuites pénales.
Au-delà de l’aspect juridique, un accident lié à un mauvais emballage ou à un transport mal sécurisé peut provoquer une pollution, des blessures, voire un incendie. Ces conséquences ont un impact direct sur la réputation et la continuité d’activité de l’entreprise.
Bonnes pratiques pour rester conforme tout en bénéficiant des exemptions
La clé d’un transport de matières dangereuses réussi, avec ou sans ADR, réside dans la préparation. Trois réflexes essentiels s’imposent :
- Vérifier la classification du produit : avant tout transport, identifiez précisément la matière : numéro ONU, classe, groupe d’emballage. Une erreur de classification annule toute exemption. Par exemple, un produit corrosif UN 1760 (classe 8) doit être emballé selon son groupe d’emballage II.
- Contrôler les quantités et les emballages : chaque classe de danger impose des seuils de quantités limitées. Les dépasser, même légèrement, soumet le transport à l’ADR complet. Les emballages doivent porter le marquage « UN » et être adaptés au produit.
Tenir à jour les formations et les certificats : Les exemptions n’excluent pas le suivi documentaire : formation du personnel, certificats d’emballage, registres de transport. Le conseiller à la sécurité TMD, obligatoire pour certaines entreprises, veille à la conformité globale.